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Pitié, rangez vos mots valises !

  • thomasgrimont
  • 3 oct. 2022
  • 3 min de lecture

Le management est fréquemment pollué par l’utilisation de termes vagues, creux et abscons. Les mots bidons foisonnent, comment remettre de l'ordre et du sens ?

[...]

Ce n’est pas juste une manie. Avec les années, j’ai constaté que l’utilisation de mots bidons est une plaie du management. Je le constate dans mes séminaires, dans mes cours mais aussi à la lecture de rapports et lorsque je participe à des présentations. Il y a beaucoup de ces mots, mais parmi mes favoris, on trouvera le « cœur de métier ». Dans un cas que j’utilise beaucoup, le PDG énonce ainsi que face aux ruptures de son environnement, sa stratégie est d’innover « en restant près de son cœur de métier ». Lorsque je demande aux participants de justifier cette stratégie, ils réussissent généralement à répondre qu’elle traduit une approche prudente: l’hypothèse du PDG est qu’en restant près de son cœur de métier, il prend moins de risques. Cela semble logique. (...) Mais ce n’est pas tout: lorsque je demande aux participants de m’énoncer le cœur de métier de l’entreprise, j’ai en général six à sept réponses différentes! (...).

« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément. » Nicolas Boileau

Il y en a d’autres. « Agile » est employé à tous bouts de champ. Personne ne sait vraiment ce que ça veut dire, mais ça sert à tout. Agile c’est à la fois innovant, rapide, souple, entrepreneurial, enfin bref plein de trucs supers que c’est bien que ça marche vachement bien, en plus c’est plutôt fun. J’intervenais l’autre jour auprès d’une entreprise qui venait de payer très cher un rapport où on enjoignait à ses collaborateurs d’être plus agiles. Sérieusement! C’est un but d’être agiles? On imagine que depuis, ils ont pris des cours de gymnastique? Je passe sur « intelligence collective » qui, en gros, veut dire travailler avec les autres, mais ça sonne sans doute mieux. (...)


confusion, paresse et débats stériles

(...) L’utilisation de ces mots bidons est réellement problématique pour plusieurs raisons. Premièrement, ils masquent une pensée confuse. On les balance dans la discussion comme une sorte de joker. « Pourquoi telle entreprise a échoué dans son projet? Parce qu’ils n’ont pas été assez agiles. » Et hop, emballé c’est pesé, on passe au cas suivant.

Deuxièmement, les mots bidons traduisent une paresse intellectuelle. Conclure d’une entreprise qui a du mal à innover qu’elle devrait être plus agile, c’est supposer que l’agilité est la réponse à tout, sans avoir pris la peine de définir ce qu’on entend par agilité.

Troisièmement, ces mots bidons nous enferment dans des débats stériles. (...) Une bonne science commence par une bonne définition dit-on souvent, et cela vaut aussi pour le management s’il veut justifier sa prétention à être une science (au sens de corpus cohérent de connaissances).

Quatrièmement, les mots bidons permettent de tout justifier, et surtout l’incompétence. Ainsi j’ai souvent constaté qu’on ne dit plus désormais « Ce projet est bordélique », mais « on est en mode agile ». On ne dit plus « Vous n’aurez pas de budget » mais « Vous travaillerez en mode Lean » (...). On ne dit plus « Débrouillez-vous tous seuls! » mais « Travaillez en mode startup! ». On ne dit plus « Ce CEO ne sait pas gérer sa boutique », mais « Il est visionnaire ».

Clarté et précision pour une meilleure compréhension

Et donc dans mes séminaires, nous travaillons (...) avec une consigne très claire que je donne aux participants: vous devez me parler uniquement avec des mots que ma maman pourrait comprendre (...). Il faut reprendre les participants plusieurs fois. Mais assez rapidement ils prennent le pli… et apprécient je crois.


Nous pouvons enfin penser clairement sur des sujets compliqués. Et si vous faisiez pareil au quotidien? Et si vous cessiez d’employer tout ce verbiage qui obscurcit votre pensée? (...) le langage est l’essence-même du commerce, et donc du management: on parle pour comprendre, instruire, négocier, convaincre, vendre, acheter, ou concevoir, et même pour fabriquer. La majeure partie du travail d’un manager consiste à parler. (...)



 
 
 

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